L’article 90,1° du Code des impôts sur les revenus prévoit la taxation, au titre de revenus divers, des « bénéfices ou profits, quelle que soit leur qualification, qui résultent, même occasionnellement ou fortuitement, de prestations, opérations ou spéculations quelconques ou de services rendus à des tiers, en dehors de l’exercice d’une activité professionnelle, à l’exclusion des opérations de gestion normale d’un patrimoine privé consistant en biens immobiliers, valeurs de portefeuille et objets mobiliers ». Ces « revenus divers », à l’exclusion des opérations de gestion normale d’un patrimoine privé, sont taxés au taux de 33 %.
Dès lors que les revenus générés dans le cadre d’opérations de gestion normale d’un patrimoine privé ne sont, a contrario, pas soumis à l’impôt, la question se pose de savoir ce que l’on entend par « gestion normale d’un patrimoine privé ».
La notion de « gestion normale d’un patrimoine privé » n’est pas définie par la loi. Le législateur, dès l’année 1962, a toutefois précisé ce qui suit :
« La gestion du patrimoine se distingue, en fait, de l’exercice d’une occupation lucrative ou de la spéculation, tant par la nature des biens – c’est-à-dire immeubles, valeurs de portefeuille, objets mobiliers (tous biens dont se compose normalement un patrimoine privé) – que par la nature des actes accomplis relativement à ces biens : ce sont les actes qu’un bon père de famille accomplit, non seulement pour la gestion courante, mais aussi pour la mise à fruit, la réalisation et le remploi d’éléments d’un patrimoine, c’est-à-dire des biens qu’il a acquis par succession, donation, ou par épargne personnelle, ou encore en remploi de biens aliénés » (Doc. parl., Sénat, 1961-1962, n° 366, p. 147).
Interrogée quant à la question de la constitutionnalité de la notion d’« opérations de gestion normale d’un patrimoine privé », la Cour constitutionnelle a, dans un arrêt n°31/2022 du 24 février 2022, jugé que cette notion renvoie aux actes d’un « bon père de famille », un concept qui est généralement compris en droit comme désignant une « personne prudente et raisonnable ». Selon la Cour constitutionnelle, le législateur a précisé lui-même la notion d’« opérations de gestion normale » en recourant à un critère large, de sorte que la loi fiscale comporte un minimum de balises d’appréciation, si bien que, dans une certaine mesure, la portée de la disposition en cause est suffisamment délimitée. Selon la Cour constitutionnelle, « On ne saurait par ailleurs reprocher au législateur, au nom de la sécurité juridique, de ne pas avoir fixé en l’occurrence des critères à ce point précis que l’administration fiscale et le juge ne disposeraient plus d’aucun pouvoir d’appréciation dans une matière qui se caractérise par une très grande diversité de situations. ».
La question de savoir si des opérations relèvent de la « gestion normale d’un patrimoine privé » relève par conséquent de l’appréciation que l’administration fiscale et, le cas échéant, les juridictions judiciaires ensuite, font de la situation factuelle qui leur est soumise. Pour rappel, les critères généralement retenus pour exclure la « gestion normale de patrimoine privé » sont notamment :
- La spéculation ;
- Le recours à l’emprunt ;
- Le bref délai entre des opérations d’achat et de revente ;
- Le recours à la publicité ;
- …
Dans une perspective de sécurité juridique, le contribuable qui envisage une opération peut adresser une demande de ruling au Service des décisions anticipées qui se prononce sur toute demande relative à l’application des lois d’impôt qui relèvent de ses compétences ou dont le SPF Finances assure le service de la perception et du recouvrement. Le ruling engage juridiquement l’administration vis-à-vis du contribuable et il est, en principe, valable pour cinq ans.